Casualties
in Time and Space by
Chantal DesRochers (English)
Temps et Espaces Accidentés
par Chantal DesRochers (French)
Un plan pas tellement rassurant by
Suzanne Richard
Casualties in Time and Space
by
Chantal DesRochers
Vernissage Magazine, Spring
issue, 2004, Canada
Come on in. Don’t be afraid.
Push the door of Axe Néo 7, an artist-run centre in
Gatineau. All you need is a little curiosity, and I know you
will be consumed by an irrepressible desire to experience
these new surroundings. Between now and 12 October 2003, the
British collective KIT has occupied three adjoining galleries
with three installations under the name of Missing Mass.
Expect an amazing and powerful
face-to-face encounter. Photographs of casualties in time
and space cover the walls like commemorative plaques, like
Stations of the Cross. The airplanes, cars, assemblages of
scrap and paint they depict are still recognizable, but are
full of pathos and blood, the victims hidden from view. Only
surgical light remains, as cold and shadowless as in an operating
room – proof of the tragedy staring us in the face,
making us feel like insurance adjustors indifferently assessing
the telling clichés of what might have been a fatal
crash.
A massive hourglass fills the
second room. Its upper half is made from seat covers from
wrecked cars. They are fastened with surgical probes to an
inverted pyramid that bears a photograph reproduced from the
Jurassic Park video game. Similar cocoons or mummies were
on view in previous KIT exhibitions, such as Autoskinning,
which emphasized in red the dehumanized, anonymous, serial,
mechanical tenor of our times, which is not exempt from the
omnipresent theme of death. I interpret the violent and sudden
impression that this work confronts us with as follows: the
seat covers are like shrouds whose human remains, it goes
without saying, could sustain a vanished world – a Missing
Mass – but there are as many readings as there are visitors.
From the ear’s perspective, silence gives way to a recording
of airbags blowing up in the evemt of collision. Before asking
one of the artists at the opening what this wound was, I thought
it was a heartbeat speeding up.
The photographs calling out
to us in the last room could be taken directly from our collective
memory of September 11th. We are surrounded by metal and glass
towers engulfed in firestorms that bear witness to the madness
of men, but I have been informed these works were created
prior to 2001. Its is hard not to see traces of British humour
in them – very black humour! At the top of the skyscrapers
wait small red ovals, not so much like drops of blood as like
space ships, which could be the means of escape from this
urban catastrophe.
Left alone after the public
had left the gallery, I felt overwhelmed, as if trapped among
these photo installations. Dizzy, a shiver running down my
spine, I felt vulnerable to the KIT universe, which spoke
to me of solitude, of powerlessness before life’s uncertainties
– and of you as well, whom I invite to visit this Missing
Mass.
Temps
et Espaces Accidentés par
Chantal DesRochers
Vernissage Magazine, Spring issue,
2004, Canada
Approchez, n’ayez pas
peur. Poussez la porte du centre d’artistes AXENEO7
de Gatineau. Vous n’avez besoin que d’un peu de
curiosité, et je sais que très vite vous éprouverez
le besoin irrépressible d’être dépaysé.
En ce moment, et jusqu’au 12 Octobre 2003, c’est
le collectif britannique KIT qui occupe ces trois galeries
mitoyennes avec les installations de Missing Mass.
Attendez-vous a un face-à-face
étonnant, percutant. Des photographies de temps et
d’espaces accidentés placardent les murs tels
des ex-voto, des stations de la croix dans une église.
On y voir des avions, des voitures, assemblages de ferraille
et de peinture, encore reconnaissables mais tout pathos, sang,
victime en sont occultés. Il ne reste que la lumière
chirurgicale, froide comme celle d’un scialytique, preuve
qu’il y a eu drame qui nous saute aux yeux, qui nous
donne la sensation d’être un agent d’assurances
qui évalue avec indifférence ces clichés
révélateurs d’un impact qui fut peut-être
mortel.
Dans la seconde salle, un énorme
sablier habite l’espace. Il est constitué, cône
supérieur, de housses de sièges d’automobiles
accidentées reliées par des sondes a une pyramide
inversée sur laquelle est reproduite une photographie
tirée du jeu vidéo Jurassic Park. De pareils
cocons ou momies ont été vus dans des expositions
précédentes de KIT, comme dans Autoskinning
qui soulignait alors en rouge le côté déshumanisé,
anonyme, sériel mécanique de notre époque,
non exempt du thème omniprésent de la mort.
C’est donc une image coup de poing qui nous attend et
que j’ai déchiffrée en ce sens : les housses
sont pareilles à des suaires dont le contenu humain,
il va sans dire, alimenterait un monde disparu. A Missing
Mass. Mais comme il y a autant de lectures possibles que de
visiteurs…Du côté de l’oreille, le
silence fait place à une bande-son, l’enregistrement
du bruit d’éclatement des sacs gonflables qui
nous protègent en cas de collision. Avant d’en
vérifier la provenance auprès d’un des
artistes présents lors du vernissage, je croyais aux
battements d’un cœur qui s’emballe.
Dans la dernière salle,
les photographies qui nous interpellent semblent tout droit
sorties de la mémoire collective. Celle du 11 septembre.
Des tours de métal et de verre aux prises avec des
tempêtes de feu nous entourent, gardiennes de la folie
des hommes mais on me précise que ces œuvres sont
antérieures à 2001. Et qu’il faut plutôt
y voir une trace de l’humour anglais. De l’humour
noir! Car au sommet de ces gratte-ciel, il y a de petits ovales
rouges, moins gouttes de sang que vaisseaux spatiaux qui sont
autant de moyens de transport pour quitter ces lieux de catastrophe
urbaine.
Demeurée seule
après que le public eut quitté la galerie, j’ai
senti une émotion me submerger, comme si je me retrouvais
piégée par ces installations photographiques.
Une sensation de vertige régnait, j’avais froid
dans le dos, réceptive à l’univers de
KIT qui me parlait de solitude, d’impuissance devant
les alès de la vie et de vous aussi, que j’invite
à participer à cette Missing Mass.
Un plan pas tellement
rassurant by
Suzanne Richard
Voir Newspaper,
October 12th 2004, Canada
À la fois absurdes et
apocalyptiques, trios installations de KIT forment une machination
d’apparence autonome, à la fois ingénieuse
et <<dysfunctionnelle>>.
KIT est , grosso modo, le fruit
d’une collaboration mouvante de professionnels divers,
auters, artistes, architectes, programmeurs, en provenances
du Canada, du Royaume-Uni et de l’Australie. De passage
en Outaouais en 1999 avec Greylands / Zones Grises, KIT mettait
alors à la disposition du public un robot, Mobot, muni
d’un système GPS permettant de le diriger, à
partir du Web, sur les plaines Le Breton, question d’avoir
vue sur ce paysage toxique, d’archiver ses composantes,
etc…
L’atmosphère est
futuriste, formée de plans graphiques et d’accessoires
calculès. Des fabrications de tissus, que l’on
pourrait prendre pour des vestes de parachutes ou encore des
recouvrements de sieges d’auto, sont suspendues dans
les trois salles, regroupèes. Composèes de trous,
d’X taillès, de ceintures, d’equations
mathèmatiques, ces fabrications, comme d’autres
èlèments, laissent transparaître une certaine
aliènation. Par example, dans l’une des salles,
au sol juste sous ce fabrications de tissus, repose un kit
de survie inutile, comprenant des câbles électriques
neufs coupés de leurs fiches de branchements, des abris
précaires, compacts et minces avec des igloos imprimés
dessus tel un logo. Au mur, plusieurs dessins techniques montrent
des structures transparentes et fragiles, placées sur
le x d’une grille comme pour dire <<je suis ici>>,
s’affichant du même coup comme cible Par l’ensemble
de ces dessins, une sequence raconte en codes les différentes
étapes du plan stratégique conçu pour
se protéger d’un cercle rouge, anonyme.
Toutes les salles donnent, par
le biasis d’images, un point de vue complémentaire
à l’autre, déterminent le champ d’opération
dans lequel sont suspendus les <<parachutes>>.
Dans l’une d’elles, trois séries d’images,
se rapportant au transport, l’habitât et les appareils
scientifiques, occupent chacune un mur selon son propre domaine.
Et, comme pour mieux se concentrer sur leurs applications,
les éléments sont paradoxalement isolés
de leurs environnements, flottants. L’installation en
angle 3D de ces images ainsi que la prise de vue en courbe
formée par l’ensemble évoquent le mouvement
de la caméra de surveillance. Dans la troisiéme
salle se trouve l’image d’un lieu désert,
rouge, sablonneux et sans la moindre trace de vie apparente,
imprimée sur le tissu d’une tente suspendue à
l’envers. On dirait un parachute commun ou la terre
flottante dans l’univers, tenant à elle, à
l’aide de boyaux de plastique, les fabrications de tissus,
têtes en bas. L’éclairage intérieur
de la tente s’ajoute au tragique de la bande sonore
entremêlée de bombes, de sirènes, de battements
de coeur, qui deviennent, à l’occasion, matière
à compositions technos.
Enfin, missing mass du
collectif KIT, c’est un système de défense
à assembler comme on assemble le meuble acheté
chez IKEA. Sauf qu’ici, le plan ne permet pas de composer
un stratagème qui saura se tenir debout, j’en
ai bien peur. Car, malgré cette distance reliée
au stade de l’hypothétique, il y a quand même
du vrai là-dedans…
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